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🏭 Industrie - Forges et forgerons de Dardennes




Cet article a été publié dans le bulletin 70 de janvier 2020 de la Société des Amis du Vieux Revest. En téléchargement là >>>   Vous pouvez également acquérir  cette publication au format papier. Pour tous renseignements, contactez-nous là >>>

Les forges de Dardennes

Au hameau de Dardennes, un long mur revêtu de fresques borde le chemin le long de la rivière, face au jeu de boules. Il s’y cache aujourd’hui des maisons d’habitation, mais pendant deux ou trois siècles, cet enclos abritait des activités industrielles. Ce qu’on appelle généralement les Forges de Dardennes fut connu sous bien des appellations différentes, avec des activités qui ont évolué au fil du temps et sur des localisations différentes au sein du hameau de Dardennes. A ce stade de notre étude, nous n’affirmons pas, nous cherchons …

 

L'enclos des forges en 2010, avant la fresque murale - photo René Vernet
L'enclos des forges en 2010, avant la fresque murale - photo René Vernet

 

L'enclos des forges avec le trompe-l'oeil
L'enclos des forges avec le trompe-l’œil © Cécile Di Costanzo pour les Amis du Vieux Revest

 

 

Ce n’est pas derrière ce long mur qui date peut-être de 1747 que commencent les aventures industrielles du hameau de Dardennes. Remontons un peu le temps … et la Dardennes, empruntons sur cinq cents mètres le chemin du Château, l'ancien Chemin Royal, branche du chemin médiéval de Toulon à Marseille créé vers l'an mil par les vicomtes de Marseille pour contrôler leurs possessions toulonnaises. On longe la rivière sous les fraîches frondaisons, et soudain devant soi se dresse le château de Dardennes. Sombre, massif, imposant, il domine le chemin de ses lourdes murailles. Et là, sur la droite, juste avant que le chemin ne devienne pente raide et oblique sur la gauche, se trouvait le premier atelier de 1671, derrière la dernière maison située avant le porche.

 

La poudrière de Dardennes en 1671

Honoré de Thomas Seigneur de Dardennes détache du fief en 1671 une parcelle de terre qu’il vend à la ville de Toulon. Cette acquisition s’opère dans le cadre plus général de la mainmise de la grande cité sur les ressources hydrauliques de son petit voisin : les sources du Revest et les activités industrielles qui y sont associées, comme les moulins à farine ou à huile de la vallée qui font partie de la transaction.

 

La communauté de Toulon construit là un martinet à poudre ou moulin à poudre, que l’on connaîtra encore sous le nom de Poudrière de Dardennes.

 

1671, c’est l’année où Colbert demande à Vauban de transformer le port militaire de Toulon et d’agrandir l’arsenal. A Dardennes, on implantera une poudrière à l’usage de la marine royale. Il s’agira de broyage de salpêtre et de fabrication de la poudre. Les travaux s’étalent de 1671 à 1673. L’explosion accidentelle de la poudrière le 17 octobre 1684 remet en question la destination de l’établissement.

 

 

Cadastre napoléonien - Légendes d'Ifor Fédoroff selon le livre AVR Seigneurs de Dardennes du Moyen-Age à la Révolution
Cadastre napoléonien - Légendes d'Igor Fédoroff selon le livre AVR Seigneurs de Dardennes du Moyen-Age à la Révolution

 


La fabrique aux ancres de 1690

Après plus de 5 années d’expertises et d’études, il est décidé que ce sont de grosses ancres que l’on construira à Dardennes. Les forges de Dardennes prennent du temps pour atteindre leur vitesse de croisière. L’activité navale militaire connaît une période de déclin en Méditerranée pendant un demi-siècle. Le port de Toulon ne retrouvera qu’à partir de 1738 son statut de port militaire d’envergure. On parle alors de Fabrique aux ancres, avec un martinet de fer, qui devait se situer un peu plus bas le long de la Dardennes, au niveau actuel de la maison Les Jeannettes et qui ne tournera à plein régime qu’à partir de 1722.

 

Entre temps, il y avait eu 1707 et le pseudo-siège de Toulon avec les exactions des troupes du Prince Eugène au Revest (Voir sur le Revestou : La marche héroïque des soldats du Roy) et la terrible année de la peste en 1721 qui décima 60 % de la population revestoise.

 

L’atelier des monnaies de 1710

L’épisode du 6 deniers de Dardennes avait pu relancer l’activité industrielle du hameau entre 1710 et 1712, mais c’était un atelier auxiliaire établi spécialement et affecté exclusivement à cette activité de fabrication de la monnaie. (voir l’article sur le Revestou)

 

Une pièce de Dardennes
Source image : Wikipedia

 

Mais où se trouvait l’atelier des monnaies ? Peut-être à côté du martinet de fer consacré aux ancres. Selon Armand Lacroix, notre expert numismate revestois, on ne frappait pas monnaie au Revest : on y préparait seulement les flancs des pièces qui étaient ensuite expédiées à Aix pour la frappe.

 

Pourquoi Dardennes ? A la fois tradition professionnelle forgeronne, quantité d’eau courante pour la forge, et surtout proximité du port militaire, dont les rebuts métalliques allaient fournir la matière première des pièces de monnaie.


La frappe de monnaie à partir des canons avait été prévue dès le siège de Toulon en 1707, dans le mémoire du 2 juillet 1707 sur la défense de la Provence devant les troupes du Prince Eugène, dans le cadre de la guerre de succession d’Espagne. Le conseiller de Louis xiv était en faveur du sabordage de la flotte en rade de Toulon, avec le préalable du débarquement des canons :

 … après avoir bien cherché le moyen de fournir d’ailleurs aux dépenses qu’il faudra faire dans une semblable conjoncture, je n’en ai point trouvé de plus présent ni de plus sûr que de faire au plus tôt une monnaie des canons de fonte qui sont au roi dans Toulon, au lieu de les couler à fond ou de les envoyer au-delà du Rhône, puisqu’on serait en risque de les perdre. Quel que soit celui que l’on prenne des deux partis, comme cette matière vaut son prix par elle même, elle ne peut point être refusée : et quand le roi n’y gagnerait rien, ayant d’ailleurs assez de canons de fer pour une marine qui ne sera pas de si tôt rétablie, il gagnerait bien avantageusement, dans la suite, la façon de ces mêmes canons, dès qu’ils serviraient à conserver sa marine dans une occasion semblable.
Quant à la fabrique de cette monnaie, elle ne coûtera pas beaucoup et fera bientôt son effet, si, sans s’attacher à la rendre uniforme, on y met seulement un coin qui la fasse valoir ce que chaque morceau pourra peser, en donnant seulement un prix à la matière. Cette monnaie sera véritablement un peu incommode, mais on fait bien en Suède des paiements par bateaux entiers chargés de cuivre, et cette monnaie ne durera de plus qu’autant que l’on voudra.

Source Mémoires militaires relatifs à la succession d’Espagne sous Louis xiv -tome 7 – pp387-388 Numérisé par Google.

 

On jugera par un trait de la pénurie du temps. Des canons et des mortiers en fonte de l'Arsenal ayant été délivrés, en vertu d'un arrêt du roi du 29 octobre 1709, y pour être convertis en doubles liards qui furent fabriqués à Dardennes et distribués aux salariés, quelques officiers se plaignirent de ne pas participer autant que d'autres au paiement de ces doubles liards (1). Le port ne s'alimentait plus que par des ventes. On se défaisait de beaucoup de cordages, de voiles, de canons superflus, et très-souvent d'objets fort utiles. Le Ministre, qui donnait les ordres de ces ventes, semblait en avoir des remords, mais on lui répondait qu’il avait fallu caréner tel ou tel vaisseau privé de secours, qui allait couler.
Ces pièces de 2 liards reçurent du peuple le nom de dardennes. Elles ne furent pas frappées à Dardennes même, mais le plus gros travail s'y fit ; un entrepreneur, le sieur Allain, se chargea, selon les termes de son marché, de la matière des canons, de la fondre et refondre, de la passer en lames, de la couper en flans, de la recuire et mettre en couleur, jusqu'à ce qu'elle fût en état d'être monnayée; tout cela se fit à Dardennes. d'où l'entrepreneur se chargea de transporter tes flans aux monnaies voisines d'Aix et de Montpellier, pour recevoir l’application du coin. Toulon livra à peu près un million de marcs de cuivre; chaque mate devait produire 15 sous, 3 deniers net. Le sieur Allain avait trois sous par marc, des flans prêts à monnayer.

Source : Octave Teissier Une visite à l’arsenal de Toulon, 1861, Hachette, Paris p99-100

 

L’enclos des forges de 1747

1747 est une année charnière pour les forges de Dardennes. Depuis 1738, la Royale a repris des couleurs en Méditerranée.


Pierre Aguillon capitaine d’industrie, propose à l’intendant de l’arsenal de Toulon, Bourgeois de Geudreville, un nouveau concept pour une forge à Dardennes. Il reprend la belle idée de récupération de déchets métalliques de l’arsenal, qui avait fait le succès de l’atelier des monnaies en 1710. Son projet est une petite structure, une forge de proximité qui pourra répondre avec souplesse et réactivité aux commandes sur mesure des ingénieurs de la Marine. Le prix de revient sera très modéré, en raison du faible coût de la matière première (de récupération) et des transports (courts avec l’Arsenal). Recyclage, proximité, circuit court, taille humaine, adaptation, énergie hydraulique renouvelable, on étiquetterait aujourd’hui ce programme écoresponsable ou même décroissant ! Qu’on ne s’y trompe pas : avec les nombreux contrats qu’elle va passer avec l’arsenal, la famille Aguillon y trouvera son compte, d’autant plus qu’elle va développer aussi une clientèle privée.

 

Dans une lettre du 10 juillet 1775 au ministre de la Marine, Bourgeois de Geudreville rappelle «  la nécessité de soutenir un établissement dont l’utilité est généralement unanime par la facilité avec laquelle on peut fabriquer autant d’ouvrage qu’on ne pourrait se procurer qu’à très grands frais dans les forges ordinaires. » Dans le même temps, l’immense complexe sidérurgique de Babaud de la Chaussade à Cosne éprouve des difficultés économiques à élargir la gamme de ses produits et manque de réactivité pour répondre à des commandes sur mesure en raison d’une organisation rigide.

 

La famille Aguillon investit lourdement dans la construction de cet établissement industriel ; notons qu’on ne parle plus de propriété de la communauté de Toulon (jusqu’à preuve du contraire : on en retrouve la trace que pour le terrain situé juste au-dessous du château de Dardennes, pas pour l’enclos des forges plus au Sud). Et les Aguillon édifient, derrière les murs, usines et bâtiments qui constitueront les forges, fonderies et ateliers de clouterie et autres ouvrages en fer fondu et battu. Et là, c’est de l’enclos des forges dont il s’agit.

 

C’est à ce moment précis que plusieurs familles de forgerons, notamment nivernais, s’installent à Dardennes. Ils vont participer à la prospérité de l’établissement qui va perdurer jusqu’à l’arrivée à Toulon des troupes de la République.

 

La Révolution amorce la fin des forges

Décembre 1793. Après la prise de Toulon grâce à Bonaparte (voir sur le Revestou : Bonaparte au Pas de la Masque ), la Convention réglait ses comptes avec Toulon, la ville renégate. Elle la priva de son nom pour la punir de sa reddition aux Anglais et la renomma Port-la-Montagne. Les Anglais avaient incendié la ville en la quittant et la Convention avait ordonné que ce qu’il en restait soit rasé et ses habitants fusillés. (cf article Charlier de Vrainville) A Toulon, l’arsenal maritime était dévasté, les forges de Dardennes avaient été pillées. Mais la République avait besoin d’un port militaire sur la Méditerranée et va le reconstituer en moins de 4 ans, puisqu’il sera fin prêt pour la campagne d’Égypte en 1798. Dès 1794, la Convention affecte la forge de Dardennes à la fabrication de boulets, bombes et obus.

 

Dans le recueil des actes du Comité de Salut Public (Tome seizième – du 10 août 1794 au 20 septembre 1794) se trouve un arrêté du 4 septembre 1794, concernant l’avenir de la forge de Dardennes :

• La fonderie de canons établie au Port-de-la-Montagne et celle qui se construit dans la commune de Marseille sont supprimées.
• Il ne sera conservé provisoirement au Port-de-la-Montagne que les fourneaux à réverbères, et le nombre de tours nécessaires à la fabrication des boulets pour la marine des mêmes ouvrages, tels que vis, écrous, poulies, robinets, etc., employés au gréement et à l’approvisionnement des vaisseaux.
• Les fourneaux, fosses à couler, autres que ceux nécessaires aux travaux désignés dans l’article précédent seront démolis, et il ne sera réservé au Port-la-Montagne que les usines et ouvriers reconnus d’indispensable nécessité au travail des mêmes ouvrages.
• La forge de Dardennes, sise à quelque distance du Port-la-Montagne, sera affectée à la fabrication de boulets, bombes et obus, et de fers pour l’arsenal de construction : toutes les réparations et augmentations jugées nécessaires à l’activité de cet établissement seront exécutées sans délai, et il y sera envoyé de la fonderie de Marseille les ouvriers reconnus nécessaires.
• La Commission des armes, poudres et exploitation des mines demeure chargée de l’exécution du présent arrêté.
Signé : FOURCROY

 

En 1807, l’usine prend le nom de Forges Impériales Maritimes, sous la direction de Joseph Vincent (fils de François, génération 2 des Vincent)

Mais l’approvisionnement en combustible était problématique déjà depuis 1792, la rentabilité n’était plus là. Joseph Aguillon, n’avait pu obtenir réparation après le pillage de 1793, mais il faut dire qu’il figurait avec sa nombreuse famille sur la liste des émigrés Toulonnais. Il finit par vendre les forges par acte notarié du 3 décembre 1819 à MM. Honnorat, Colombeau et Cie. Il avait 81 ans et mourra au Revest en 1824.

 

 

Illustration du martinet - cours de mécanique de Charles Delaunay, édition 1868
Illustration du martinet - cours de mécanique de Charles Delaunay, édition 1868

 

 

Un projet d’affiche de 1820 donne un descriptif de l’usine de Dardennes : une affinerie, un grand martinet à deux foyers, un petit martinet à un seul feu, 16 petites forges à bras, 4 petites forges de chantiers également à bras.
A plein régime, la forge employait jusqu’à 30 personnes. Mais en 1820, il n’y en avait plus que 5 ou 6.

 

Après la vente de 1819, l’activité de la forge va continuer, mais, si l’on peut dire, à petit feu. L’établissement va péricliter, puis en 1825, de nouveau changer de destination et deviendra une papeterie. L’enclos abritera ensuite, successivement et dans le désordre, une filature de coton, une fabrique de carton, une laiterie, un entrepôt, un atelier de goudronnage, l’écurie des chevaux de l’omnibus, une sorte de zoo. Pendant la dernière guerre, les soldats allemands y installeront la boulangerie. Aujourd’hui, ce sont des maisons d’habitation qui se cachent derrière ces hauts murs.

 

Cadastre napoléonien - Légendes d'Igor Fédoroff, selon le livre AVR Les seigneurs de Dardennes du Moyen-Age à la Révolution
Cadastre napoléonien - Légendes d'Igor Fédoroff, selon le livre AVR Les seigneurs de Dardennes du Moyen-Age à la Révolution

 

 

Les forgerons de Dardennes

Plusieurs forgerons nivernais arrivent donc au Revest à partir de 1746.
Parmi les forgerons, on trouve deux lignées qui portent le même patronyme, Vincent, ont la même tradition de prénoms et viennent du même village de Cosne-sur-Loire dans la Nièvre et plus précisément de la paroisse Saint-Agnan. Sans que l’on puisse confirmer (en l’état) que ces familles soient alliées.

Les forgerons de Cosne

Madame de Sévigné, dans une lettre à sa fille Madame de Grignan, nous éclaire sur la tradition forgeronne de Cosne : en 1677, on y fabriquait déjà des ancres de marine : 

Les forges de la Chaussade, de nos jours
Les forges de la Chaussade, de nos jours

 

Hier au soir à Cône nous allâmes dans un véritable enfer, ce sont des forges de Vulcain : nous y trouvâmes huit ou dix cyclopes forgeant, non pas les armes d’Énée, mais des ancres pour les vaisseaux : jamais vous n’avez vu redoubler des coups si justes, ni d’une si admirable cadence. Nous étions au milieu de quatre fourneaux ; de temps en temps ces démons venaient autour de nous, tous fondus de sueur, avec des visages pâles, des yeux farouches, des moustaches brutes, des cheveux longs et noirs ; cette vue pouvait effrayer des gens moins polis que nous. Pour moi, je ne comprenais pas qu’il fût possible de résister à nulle des volontés de ces messieurs-là dans leur enfer. Enfin, nous en sortîmes avec une pluie de pièces de quatre sous, dont nous eûmes soin de les rafraîchir pour faciliter notre sortie.

Source : Wikisource

 

Plan des forges de La Chaussade en 1836 (Source : Mairie de Cosne)
Plan des forges de La Chaussade en 1836 (Source : Mairie de Cosne)

Au départ était Pierre Babaud de la Chaussade, né à Bellac en 1706. Jeune homme, il suit son père dans le négoce du bois pour la marine de guerre, avant de devenir maître de forges. Bien introduit à la cour du roi Louis XVI, il possède des forges et des bois dans le Nivernais. Il exploite la forge de Cosne-sur-Loire à partir de 1735 et assure son essor, avec un pic entre 1744 et 1781. La forge fabrique les ancres et accessoires métallurgiques pour la Marine royale, et fournit les ports de Brest et de Lorient.
Babaud devient le fournisseur quasi exclusif de la Marine royale. Mais, en homme avisé, il pressent dès 1777 le déclin de son activité et entame des négociations avec l'État, qui rachète les forges en 1781. Elles deviennent royales, tout en gardant leur nom, en hommage aux services rendus à la nation par Babaud de la Chaussade.

Sources - Mairie de Cosne : Forges de la Chaussade - Le port de Cosne

 

Ancre de Cosne trouvée dans le port de Rochefort
Ancre de Cosne trouvée dans le port de Rochefort

 

Nous avons donc là une tradition forgeronne spécialisée dans les ancres et appareillages de marine aux Forges de la Chaussade de Cosne. Est-ce à dire que ces forgerons nivernais sont venus apporter leurs techniques à la fabrique aux ancres de la côte méditerranéenne ? Peut-être, le transfert de technologie avait déjà eu lieu dans l’autre sens. En 1729, les ingénieurs de Rochefort demandent au ministre de la Marine de faire venir à Cosne pour la fabrique d’un nouveau type d’ancre de forme trapézoïdale des forgerons de l’arsenal de Toulon.

 

Dès le mois de mars 1729, il avait été prévu d’envoyer à Cosne des ouvriers ancriers formés par le sieur Renou, entrepreneur de fabrique des ancres à Toulon. Le sieur Chesnay, que M. Mithon emploie dans l’arsenal de Toulon n’attend que l’ordre de partir pour Cosne, ce qu’il fait en juillet 1730. Le ministre l’annonce à Tassin en lui précisant qu’il a travaillé à Dardenne.

Source : Six millénaire d’histoire des ancres – De Jacques Gay.

 

Le forgeron François Vincent au Revest

Intéressons nous à la famille de François Vincent qui vit le jour vers 1733 à Cosne-sur-Loire. Sur son acte de décès au Revest le 6 décembre 1804, il sera mentionné qu’il est résident de la commune depuis 58 ans, ce qui nous ramène en 1746.

 

François Vincent va se marier en 1749 avec une Revestoise fille de cultivateurs, Marguerite Vidal, alliée aux Artigue et aux Teissseire.

 

Nous avons pu identifier 174 descendants directs de François Vincent, sur 10 générations. Certaines branches sont plus détaillées, et plus longues, non que toutes les autres lignées se soient interrompues, mais elles se sont perdues, que les descendants aient quitté le village ou que ce soient les filles qui soient plutôt restées, ne permettant pas d’y pérenniser le patronyme. Et sous leurs noms de femme mariées, elles sont plus difficiles à pister… Sur Geneanet, plusieurs descendants contemporains de François Vincent ont publié leurs recherches généalogiques, ce qui explique que l’on puisse descendre sur 10 générations, malgré la limite légale des archives départementales.

 

Descendants de François Vincent (10 generations)

Générations Parenté Total
Enfants 8
Petits-enfants 26
Les arrière-petits-enfants 24
2 x Les arrière-petits-enfants 34
3 x Les arrière-petits-enfants 14
4 x Les arrière-petits-enfants 12
5 x Les arrière-petits-enfants 13
6 x Les arrière-petits-enfants 22
10  7 x Les arrière-petits-enfants 21
  Total 174

 

 

Sur les 8 enfants du couple, 3 garçons (Edmé, Joseph, Alexis) seront forgerons, puis contremaîtres à la forge. Parmi les filles, Catherine épousera un maréchal ferrant et Marie un forgeron fils de forgeron. A noter que le père de François était déjà forgeron. Un des 8 enfants, Cézar, mourra jeune et nous n’avons trouvé que le nom des époux de Claire et de Catherine, nous ne savons pas si elles ont eu des enfants.

 

Sur la génération 3, les 26 petits-enfants de François descendent de 5 de ses enfants.

 

Pendant la Révolution, 18 Revestois ont figuré sur la liste des émigrés. Parmi eux, Marie Vincent (génération 2) et son mari Nicolas Le Tellier, forgeron. Mais aussi un François Vincent, forgeron, que nous ne pouvons identifier avec certitude. Notre François Vincent, Maître des forges de Dardennes avait en effet un homonyme, forgeron au Revest et natif de Cosne tout comme lui.

 

Au recensement de 1841, Edmé Vincent (génération 2) et deux de ses fils se déclarent encore forgerons à Dardennes. Son frère Joseph est adjoint au maire.

 

En 1846, seules deux maisons du hameau de Dardennes abritent encore des Vincent : Joseph (génération 2) et sa femme Élisabeth Daumas qui ont 72 ans. Et Reine Théotiste, la veuve d’Edmé avec sa fille Élisabeth qui a 24 ans.

 

En 1851, Reine, 71 ans, vit avec sa fille Élisabeth et deux de ses fils, forgerons, qui sont revenus vivre à la maison : Joseph, 32 ans et Aimé, 28 ans. (Génération 3)

 

En 1856, Reine, 78 ans, vit seule mais sa fille Élisabeth vit aussi à Dardennes, elle a épousé le boulanger Guillaume Alexandre Bonin et ils ont un petit garçon, Paul Gustave. (génération 4). Qui va se marier (avec Marie Reboul) ; ils auront 5 enfants (génération 5) qui grandiront à Dardennes. Parmi eux Paul qui à 14 ans travaillera déjà avec son père lequel est devenu marchand de tissu.

 

Noël Vincent, (génération 4) arrière-petit-fils de François, était maire du Revest de 1881 à 1882 et son nom est porté sur le mémoire de 1882 sur la tentative de détournement des eaux du Revest. Il était écrivain de marine et ne s’est pas marié.

 

Après 1901 et la famille Bonin, on ne trouve plus à Dardennes de descendant de François Vincent.

Et le patronyme se perd après la naissance en 1895 de Marius Gustave Vincent, nous sommes à la 6e génération, là. Enfin, en l’état actuel de nos connaissances.

Pourtant en 1827, après la fin des forges, les 3 fils forgerons de François étaient des propriétaires terriens à Dardennes (au sens large, car aussi aux Teisseires, à la Barbasse, et aux Forges. Voir aussi à quels lieux correspondent les sections C et D : https://revest.legtux.org/topic263-activites-industrielles-au-revest-au-xixe-siecle.html)

 

Matrice cadastrale 1827 - Source Archives départementales du Var
Matrice cadastrale 1827 - Source Archives départementales du Var

 

Quant aux forgerons … de nos jours au Revest, peut-on dire que Jean-Paul Maul demeure le dernier représentant de la tradition forgeronne avec son atelier d’armurerie médiévale ? Ou bien encore Francis Lanciaux, le métallier du quartier des Ponts : tout comme les forges de Dardennes de 1747, le travail s'effectue aujourd’hui autant pour l’arsenal (il est spécialisé dans les structures sous-marine) que pour le privé (avec des clients comme Aqualand ou Marineland.)

 


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