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♖ Tourris - Le domaine de Tourris - 1938




E. Joseph : le domaine de Tourris - in Le Var historique et géographique - octobre-décembre 1938


Il s'étend sur un vaste plateau d'une superficie de 1500 hectares dont 900 sur la commune du Revest, 400 sur celle de la Valette et 200 sur celle de Solliès. Il renferme 540 hectares de terres arables; le reste est couvert de bois ou de taillis.


Sa position au milieu de collines en fit un camp retranché naturel contre, notamment, les incursions sarrasines et lui donna, depuis les temps les plus reculés, une population relativement nombreuse.

Nous avons, en ce qui a trait surtout à son histoire, recueilli quelques notes que, sous divers titres, nous allons faire connaître.

 

I. Transaction du 12 décembre 1287

Elle fut passée dans le monastère du Val (La Valette) devant Jacques de Garde, notaire royal, pour mettre fin à de nombreux procès entre, d'une part, le prieur et les habitants de la Valette; d'autre part, le seigneur et les habitants de Tourris. Cet acte, résultant d'un arbitrage, accorda aux premiers le plein usage du territoire de Tourris. Étaient intervenus dans la convention : Guillaume Dracon, écuyer d'Hyères, procureur de Foulque de Bras, ce dernier prieur de l'église de Saint-Jean du monastère du Val; Guillaume Chassaud, Pierre Crapon, syndics de l'université et communauté de ladite abbaye; Guillaume de Saint-Pierre, écuyer de Toulon, procureur de noble Reforciat, celui-ci seigneur de Trets et de Tourris ; Pons de Cabriès, prévôt de l’église de Pignans ; Montréal, chevalier de l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean tous deux arbitres ; Pierre Coitier, chanoine de Toulon ; Laugier Sicard, « discret docteur » ; Hugon. De Fos; Foulques de Vissier; Étienne Crapon, clerc; Gaufredi Audiffren; capitaine Jean Jourdan de Beaucaire.

 

II. Les seigneurs

Malgré quelques lacunes, voici leur liste et, quand cela est possible, quelques détails sur eux :


  • Reforciat (1287) en même temps seigneur de Trets ;

  • noble Rostand Fresquet (1367), de Toulon

  • noble Clappier (1400)

  • comtes de Vintimille, seigneurs de Marseille et d'Ollioules, dont Melchior de Vintimille qui échangea le fief de Tourris contre de vastes terres à Ollioules appartenant à

  • Jean de Chautard (1550)

  • Louis de Nas (1551) l'époux de Catherine de Chautard, fille de Jean, qui précède (la famille des Nas était originaire d'Aix-en-Provence; en 1494, un Simon Nas y était second consul; iI fut anobli par Charles VIII le 8 mars 1495 à la suite de bons services rendus pendant la conquête du royaume de Naples);

  • Jean-Baptiste de Nas. fils du précédent, époux en 1568 de Claudine de Thomas, fille de Jacques, seigneur de Sainte-Marguerite et d'Évenos, et de d'Anne de Vintimille, des comtes de Marseille;

  • Bernardin de Nas (1591, fils du précédent) ;

  • François de Nas, fils du précédent, époux en 1642 de Yictoire de Saqui ;

  • Louis de Nas, fils du précédent, époux en 1670 de Claire de Martin ;

  • François de Nas, fils du précédent, époux en 1706 de Françoise du Bourguet ;

  • Jean-Baptiste de Nas, fils du précédent, époux en 1745 de Marie-Thérèse de Lambert (par acte passé le 20 janvier 1783 chez Coulomb, notaire à Toulon, il abandonna tous ses droits sur Tourris à ses deux fils Jean-Baptiste-Thomas, né en 1747, et Joseph-Marie, né en 1749). Il avait déjà vendu, à un nommé Vaccon, un quartier de Tourris, appelé les Chabertes.

 

Par acte signé le 16 juin 1785 en l’étude de Gérard notaire à Toulon, les deux frères Jean- Baptiste Thomas et Joseph-Marie de Nas, aliénèrent, moyennant 45 000 Livres, le reste du fief à Joseph Aguillon, négociant dans la même ville, qui d’ailleurs avait aussi acquis du sieur Vaccon le domaine de la Chaberte.

 

Quelques temps après, les deux vendeurs se retirèrent à Marseille, puis à l’île Bourbon où ils ont encore des descendants. Leurs armes étaient : un lion, tirant la langue, sur champ d’or.

 

III. Le recensement des biens

A la suite de l’arrêt du parlement de Provence, en date du 16 février 1540, qui ordonna le recensement général « des lieux, villages, chasteaux et de leurs biens », le sieur Louis Burle, conseiller à la Cour des comptes à Aix, fut désigné pour procéder à cette opération dans la région de Toulon, La Valette, Le Revest, Ollioules et Six-Fours. Son enquête sur Tourris donna lieu au rapport suivant :

Le jeudi vingt deuxième jour de juillet de l’an 1540, je me suis fait transporter au lieu de Tourris, auquel lieu n’y ai trouvé personne – preuve qu’il n’est pas habité – et me suis retiré au Revest qui est proche dudit lieu et, de là, dans la maison d’un particulier appelé Hugues Vidal, syndic dudit Revest, où se trouvaient Jehan Dartigue, Hugues Hermitte et Pierre Vidal, lesquels, interrogés par moi pour savoir dans quel lieu se trouvait le château de Tourris et quelles maisons y a et quelles charges ont, ils ont dit que le terroir de Tourris est possédé tant par les hommes dudit Revest que ceux de La Valette et Solliès ; qu’audit Tourris, il n’y a ni château ni maison, car tout est détruit ; il reste cependant les ruines d’une maison seigneuriale et des bastides pour la remise des hommes quand ils vont y travailler.

Quant aux charges, ils payent la tasque, droits du vingtième sur les fruits et le légume payé par les manants au seigneur de Tourris et un onzième sur le blé et une dîme d’un treizième au chapitre de Toulon. Quant aux commodités, ils ont dit que le terroir de Tourris est bon, qu’il y a des pâturages auxquels les hommes du Revest, de La Valette, de Solliès, de La Garde et de Toulon ont droit.

Quant au Revest, ils ont dit qu’il y a 46 maisons habitées et que les habitants font à leur seigneur semblables tasques et censes qu’au seigneur de Tourris. Ils payent la dîme au dixième, le fournage au vingtième et la mouture au vingtième.

Quant au terroir, ils disent qu’il est malaisé à cultiver.

IV. Le château et le parc

Jean-Baptiste de Nas, époux de Claudine de Thomas, fit, en 1568, année de son mariage, transformer en château la vieille demeure seigneuriale.


Ce château est une vaste maison carrée, flanquée à chaque angle de grandes tours cylindriques. Son extérieur, simple et modeste, est agrémenté par de la mousse, au vert tendre et velouté, qui s’harmonise admirablement avec les tuiles rouges de la toiture des tours. Son style est cependant lourd et massif. Ses murs mesurent 1m à 1m50 d’épaisseur, selon leur position. A l’intérieur, il n’y a rien de remarquable si ce n’est, au rez-de-chaussée, une haute cheminée à gauche de laquelle on voit un cellier, vestige d’une prison à double compartiment et à ouverture haute, étroite et grillagée.


Il s’élève au centre d’un vaste parc couvert d’une végétation luxuriante : arbres à essences, platanes gigantesques arrosés par un ruisseau dont les eaux vont se déverser, à l’aide d’une canalisation en poterie, dans le grand réservoir dit Le Goudron. À côté du château on voit une chapelle minuscule, de style gothique, renfermant un tableau de saint Jean-Baptiste, un confessionnal, une sacristie, une tribune à colonnes et cette inscription latine :


Hoc Templum antiquum
Ab Emilio Teissier Turris Domino
reparatum fuit anno
MDCCCLXII


(Ce temple antique fut réparé en l’an 1862 par Émile Teissier, propriétaire de Tourris)


Un petit cimetière apparaît à 50 mètres de la chapelle ; il est clôturé ; un cyprès orne chaque angle ; une petite croix de fer surmonte la porte d’entrée. Parmi les tombes, se trouve celle de Joseph Aguillon, ancien propriétaire et dernier seigneur de Tourris.

V. Tourris actuel

Il renferme une douzaine de maisons dans le voisinage même du château puis d’autres qui se sont éloignées de 250 à 300 mètres. La plupart portent le nom de l’ancienne industrie à laquelle leurs anciens habitants se livraient. Ainsi, on remarque celles de Goudron et de la Verrière, la première rappelant le traitement de la résine, la seconde la fabrication d’objets en verre, notamment de bouteilles.


Du reste, à part quelques cultivateurs, les cinquante personnes environ qui forment la population actuelle continuent à exploiter les produits des bois et ceux de sablières de de carrières qui abondent. Ces dernières donnent même des pierres de taille très recherchées parce qu’elles ont une grande analogie avec le marbre.


L’eau est abondante et limpide. Devant le château, se trouve même un grand bassin qui, à l’aide de conduits souterrains en maçonnerie, reçoit le trop-plein des eaux des barrages supérieurs du Camp de Merle. Ce dernier quartier, au nom historique, évoque le séjour qu’y firent, en 1793, sous le commandement du général Merle, de nombreuses troupe de l’armée révolutionnaire assiégeant Toulon. (Camp de Merle ne serait-il pas une déformation de Cantemerle ? On sait qu’il existe en Provence de nombreux quartiers appelés Cantemerle, Cantecigale, Canteperdrix, etc.


C’est tout ce que nous pouvons dire du domaine de Tourris qui, plutôt délaissé autrefois, attire aujourd’hui sous les frais ombrages de ses pins, de ses mélèzes et de ses chênes, une foule de touristes et d’excursionnistes.


F. Joseph, ingénieur de direction principal de travaux.

In Le Var historique et géographique, N°76 d’octobre-novembre 1938, Draguignan

Original à la Société des Amis du Vieux Toulon


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